Dessin de Bénédicte, Suisse. |
Nul doute que les médias français surveilleront de près les lectures estivales de leur nouveau président, photographié en 2007 sur un bateau pneumatique en pleine lecture de L'Histoire de France pour les nuls. Si celui-ci est comme la majorité de ses compatriotes, son choix se portera probablement plutôt sur une pile de livres de poche que sur une liseuse électronique. Le livre électronique (ebook) a du mal à séduire les lecteurs français qui leur préfèrent largement la version papier.
Les habitudes de lecture sont revenues au programme des discussions politiques cette semaine alors que le gouvernement Ayrault – désireux de protéger le secteur de l'édition et la réputation littéraire de la France – a annoncé son intention de revenir sur l'augmentation controversée de la TVA sur les livres décrétée par Nicolas Sarkozy [elle est passée de 5,5 % à 7 % au 1er avril 2012].
Alors que les librairies britanniques proposent des formules à trois livres pour le prix de deux, la France vit sous le régime du prix unique du livre, lequel sera le même partout sur Internet, chez un petit libraire ou chez un grand distributeur. Le gouvernement affirme que le contrôle des prix a sauvé les petits libraires des ravages de la vague libérale qui a frappé de plein fouet leurs confrères britanniques quand le pays a abandonné le système des prix fixes dans les années 1990. La France compte plus de 3 000 libraires indépendants dont 400 à Paris, contre environ un millier au Royaume-Uni (dont 130 à Londres). Les géants du secteur ne cessent toutefois de grignoter la part des petits commerçants qui ont de plus en plus de mal à survivre.
La question qui hante les observateurs est de savoir si les vieilles habitudes finiront par changer et si le livre électronique décollera en France. La règle du prix unique vaut également pour les lectures numériques mais le changement n'est pas qu'une question d'argent. Des études ont montré qu'à l'instar des lecteurs allemands, les Français préfèrent lire sur du papier plutôt que sur des écrans. Alors que les ventes de livres électroniques de langue anglaise augmentent à un rythme soutenu – elles représentent près de 20 % du total des ventes aux Etats-Unis et presque 10 % au Royaume-Uni –, en France ce chiffre devrait se situer à environ 3 % des parts de marché. Si certains grands distributeurs croient au succès – à terme – du livre électronique en France, le papier garde aujourd'hui l'avantage.
26.06.2012 | Angélique Chrisafis | The Guardian